La première fois que je lus ce texte je ne connaissais pas encore Moha. Nous habitions, à l’époque, l’une des tours du Val Fourré et nous avions rencontré sa sÅ“ur au cours de danse de notre fille aînée. Manon avait à peine six mois et avait « choisi  » Nadia en lui « sautant  » littéralement dans les bras. Comment ne pas lier d’amitié lorsque les enfants s’en mêlent ?
Nadia me donna à lire la « Légende  » et je l’envoyais à mon frère… qui la publia.
Ce fut le début, comme un acte fondateur.
L’écriture de Moha m’a toujours fasciné. L’image est, chez lui, mis au service du sens. On voit –je vois – les grains de sables, l’eau qui se perd sous terre et renaît salvatrice pour rythmer nos déserts.
Moha est un conteur, « Un mensonge qui dit toujours la vérité  », il dessine plus qu’il n’écrit. Il nous parle plus qu’on ne le lit. Parfois, je rêve qu’un illustrateur prenne ses encres et voyage dans ces paysages… Sait-on jamais ?
« La Légende du cheval prophète  » a été publiée pour la première fois par la revue KALEà DON en 1992.
EXTRAIT :
Tes mères engendrèrent autant de fils qu’il y a de points d’eau vive d’ici à l’arbre solitaire, assez de filles pour nous liguer nos ennemis. Elles furent l’avenir possible d’un solde de souvenirs, l’idée d’un futur. Nous ne sommes qu’un frêle rameau lorsqu’elles sont fortes à nous accoucher, que tous nos Saints les protègent ! Pour le pain qu’elles pétrissent, pour ce levain qui nous fermente, pour ce corps différent qui nous unit, pour le calme de la nuit qu’elles inspirent, Grâce Leur Soit Rendue ! Par le bavardage gracile qui nous apprend plus que la parole diplomate, par le geste de tourner la soupe qui nous évite le combat, par la pleine hanche assassine qui nous promet la force et la joie, Grâce Leur Soit Rendue ! Par nos femmes, par nos mères, nos filles, nous les délaissés, nous les abandonnés plus que d’autres encore, les Touaregs de la treizième tribu, nous tenons l’eau vive et nous ne tenons rien. Ainsi, nous sommes libres. Nous leurs devons.
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