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LES CHIENS DE ŞMYŘ

Par Moha Terzi
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Moha ne pense pas, n’écrit pas, ne compte pas comme nous. Chaque seconde, chaque minute, chaque pluie sont des instants de vie. Chaque objet a une âme, une raison d’être, est animé et nous aide àaimer, ànous parfaire.
 
Moha ne parle pas, il raconte. Son verbe traduit l’arbre àpalabres, il respire l’époque, expire les mots, et son souffle est rythmes. Les mots ne sont que des reflets qui tendent àdécrire le monde, créer des liens  :
Que cela soit  ! Et cela est.
 
Le rapport àDieu est tout entier ici  ; littéral. Ni filtre, ni gouvernance, il dit «  mille trois cent quatre-vingt seize lunes Â » et nous les voyons consteller la nuit.
 
Dans son quartier, Moha, parce qu’il vient du quartier, vit comme vous, comme moi. Peu savent qu’il ne lit pas le monde avec les mêmes lettres que nous, peu savent que Moha est le frère de Kemal, l’enfant du Prophète, le père des CENT TRIBUS. Mais quand il prend la parole, lorsqu’il s’invite àvotre table, tous savent qu’il nous contera d’étranges souvenirs àvenir.
 
Oui, Moha est un conteur qui écrit l’allitération de nos vies. Il aurait pu être chanteur, slameur, rappeur, il a choisi la prose et le rythme de la virgule, du point en haut, de la respiration sourde. Il a choisi la forme de la merveille, histoire de nous inciter àdécouvrir nos vies.
 
Le rapport àdieu est ici tout entier, encore une fois  : littéral  !
«  le rêve de l’homme crée plus que sa foi Â »
 
Cette nouvelle est extrait du cycle des CENT TRIBUS. Elle est publiée ici pour la première fois. A travers cette parabole, Moha nous raconte comment les Halamins ne purent lutter contre mais surent se sauver des Chiens de ÅžmyÅ™, «  Cerbères improbables, tatoués d’impossibles oiseaux bleutés, ils déchiraient l’étranger, l’incroyant, l’insoumis, celui qui parlait hors de la seule parole, celui qui doutait de la miséricorde, celui qui ignorait comme ignorent les enfants, celui qui croyait mais croyait àl’envers, croyait autre. Le nom de leurs victimes s’écrivait sur leurs crocs. Â »
 
EXTRAIT  :
 
Al’Latta vécut mille trois cent quatre-vingt seize lunes et chacune de ses rides était le lit asséché d’une peine. Elle connut les routes oubliées de la Numidie, l’endort du Simoun et la colère du Khamsin, la légèreté de la frontière entre le sable et le fruit, la douceur de la rosée sur son châle de nuit. Elle connut trente neuf mille quatre-vingt treize fois l’ardeur du soleil jaune tremblé de mirage et parcourut trois fois les traverses de la grande boucle.
Al’Latta accoucha treize fois sans compter les filles qui furent innombrables. De son ventre blanc la vie jaillissait, source pure irriguant les treize chemins où le parcours de l’homme s’inscrit pour l’éternité.

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